Actualités  |  Lundi 6 mars 2017

Pour un partenariat social moderne
Initiative parlementaire 17.406 déposée au Conseil national le 6 mars 2017, de concert avec mes collègues Marco Chiesa et Jean-Paul Gschwind

Texte déposé

Conformément à l'article 160, alinéa 1, de la Constitution et à l'article 107 de la loi sur le Parlement, je dépose l'initiative parlementaire suivante :

La loi permettant d’étendre le champ d’application de la convention collective de travail sera adaptée aux réalités de l’économie d’aujourd’hui en modifiant l’article 2 de la manière suivante :

Article 2

L'extension ne peut être prononcée qu'aux conditions suivantes :

1. (…)

2. (…)

3. les employeurs et les travailleurs liés par la convention doivent respectivement former la majorité des employeurs et des travailleurs auxquels le champ d'application de la convention doit être étendu, et les employeurs liés par la convention doivent en outre occuper la majorité de tous les travailleurs. Lorsque des circonstances particulières le justifient, il peut être exceptionnellement dérogé à la règle exigeant la majorité des travailleurs liés par la convention ;

3.bis lorsque les employeurs liés par la convention ne forment pas une majorité, mais représentent au moins 35% des employeurs, ils doivent occuper au moins 65% de tous les travailleurs. Si la proportion d’employeurs liés se situe entre 35% et 50%, la majorité de travailleurs requise est diminuée dans la même mesure, entre 65% et 50%. Dans ce cas, la décision d’extension ne peut porter que sur des éléments directement en rapport avec les conditions de travail, à savoir la rémunération minimale et la durée du travail correspondante, les contributions aux frais d'exécution, les contrôles paritaires et les sanctions à l'encontre des employeurs et des travailleurs fautifs, en particulier les peines conventionnelles et les frais de contrôle ;

3.bis ter en cas de requête au sens de l'art. 1a, les employeurs liés par la convention doivent occuper au moins 50 % de tous les travailleurs.

4. (…)

Développement

Le partenariat social est l’un des piliers de la culture de notre pays. Il a grandement contribué au succès du modèle suisse. Les employeurs et les employés s’accordent sur les conditions de travail dans une branche ou une entreprise, parfois à l’échelle régionale, sans que le législateur intervienne. Cela permet des solutions flexibles, spécifiques aux branches, respectueuses des différences régionales et adaptées aux réalités économiques.

Le principal instrument de mise en œuvre du partenariat social est la convention collective de travail (CCT). Il s’agit d’un contrat de droit privé conclu entre une ou plusieurs organisations d’employeurs, d’un côté, et une ou plusieurs organisations de travailleurs, de l’autre, dans le but de régler les conditions de travail de façon obligatoire pour les travailleurs et les employeurs affiliés aux organisations concernées.

Une CCT peut être déclarée de force obligatoire, c’est-à-dire étendue à tous les employeurs et employés d’une branche, par une décision de l’autorité fédérale ou cantonale compétente. Dans ce cas, tous les employeurs et employés de la branche concernée doivent respecter les règles prévues dans la CCT, même s’ils ne sont pas affiliés aux organisations signataires.

L’extension d’une CCT est réglée par la loi fédérale permettant d’étendre le champ d’application de la convention collective de travail (LECCT). Cette loi a été acceptée le 28 septembre 1956. Elle est en vigueur depuis le 1er janvier 1957.

L’article 2 LECCT fixe les conditions auxquelles une CCT peut être étendue à tous les employeurs et employés d’une branche. Ces conditions n’ont jamais été modifiées depuis l’adoption de la loi en 1956, alors que l’économie et le monde du travail ont fortement changé au cours des soixante dernières années.

L’article 2 LECCT prévoit que l’extension d’une CCT ne peut être prononcée que si les organisations patronales signataires représentent au moins 50% des employeurs de la branche (quorum des employeurs) et que les organisations syndicales signataires représentent au moins 50% des travailleurs (quorum des travailleurs). A cela s’ajoute la condition d’un quorum mixte : les employeurs affiliés aux organisations patronales signataires de la CCT doivent occuper au moins 50% des travailleurs de la branche. 

Dans la pratique, ces quorums peinent à être atteints dans certains cas, notamment du côté des employeurs dans des branches économiques où un grand nombre de micro-entreprises emploient chacune un très petit nombre de travailleurs.

Afin d’adapter aux réalités de l’économie d’aujourd’hui les conditions auxquelles l’extension d’une CCT peut être prononcée, nous proposons d’introduire les règles suivantes à l’article 2 de la LECCT :

1. Pour étendre le champ d’application d’une CCT, le quorum des employeurs pourra être inférieur à 50% à condition que les employeurs concernés emploient une part de travailleurs proportionnellement supérieure à 50%. Exemple : si une organisation patronale représente 41% des employeurs, l’extension du champ d’application d’une CCT sera possible pour autant que les employeurs concernés emploient 59% des travailleurs de la branche.

2. Afin de maintenir une représentativité correcte des employeurs, le quorum des employeurs ne devra toutefois pas descendre en dessous du taux plancher de 35%. Dans ce cas, les employeurs concernés auraient l’obligation d’employer au moins 65% des travailleurs de la branche.

3. Afin d’éviter que l’extension contrevienne à la liberté d’association, des cautèles devront être prévues. Ainsi, la décision d’extension ne pourra porter que des éléments directement en rapport avec les conditions de travail, à savoir la rémunération minimale et la durée du travail correspondante, les contributions aux frais d'exécution, les contrôles paritaires et les sanctions à l'encontre des employeurs et des travailleurs fautifs, en particulier les peines conventionnelles et les frais de contrôle.