"L’école que je souhaite doit allier excellence et égalité des chances." Cette déclaration faite par Anne-Catherine Lyon, à l’occasion de la rentrée scolaire, est l’exemple même du discours qui ne coûte rien. Car ce qui compte, dans la réalité, c’est de savoir à quoi correspond cette excellence, comment on la définit, comment on la mesure et par rapport à quels objectifs. C’est aussi de s’entendre sur ce que veut dire concrètement l’égalité des chances et sur la manière d’appliquer ce juste principe pour qu’il ne dérive pas vers la recherche d’une égalité des résultats. Tout le monde sait aujourd’hui qu’il ne suffit pas de constater que 90% d’une volée scolaire a obtenu tel ou tel diplôme pour se réjouir des résultats du système.
Une très forte majorité de notre pays considère à juste titre la formation comme l’un des piliers de notre avenir, sous l’angle aussi bien de la cohésion sociale que de la prospérité économique. Il est donc normal qu’on s’interroge à son sujet et les questions ne manquent pas. Les parents doivent-ils avoir le choix de l’école pour leurs enfants? Si oui, comment ce choix doit-il être financé? Quels outils d’évaluation des élèves faut-il retenir? On pense notamment au débat sur les notes et le nombre de voies d’orientation scolaire. Quelles sont les priorités à accorder dans la répartition des branches d’étude? L’âge de l’introduction des langues étrangères au programme est une illustration parmi beaucoup d’autres du problème. Quelle durée faut-il accorder à tel ou tel apprentissage du savoir? Etc.
Prenons ce dernier exemple. Selon les chiffres récemment publiés par l’OCDE, la durée totale des études a augmenté en Suisse de trois ans et demi depuis le début des années 1980. Cette augmentation est générale dans les pays développés et il est convenu de s’en réjouir. Je ne suis pas si sûr qu’il le faille. Aujourd’hui, les connaissances, même quand elles sont acquises à l’Université ou dans les Hautes Ecoles, sont de plus en plus rapidement dépassées par le progrès incessant du savoir. On devrait donc stopper l’augmentation de la durée des études, voire revenir en arrière, au profit du développement d’une formation continue systématique et structurée.
Toutes ces questions me paraissent pouvoir - et même devoir - être abordées dans le débat démocratique sur l’école et la formation en général. Les votations qui s’annoncent, notamment dans le canton de Vaud, constituent une chance à cet égard. Mais les responsables politiques de l’école et leurs conseillers pédagogiques n’apprécient guère cette nécessaire légitimation populaire de leurs choix. Ils ont le sentiment qu’il s’agit d’un domaine technique réservé aux experts. Ils se comportent comme si une discussion ouverte à l’ensemble des citoyens sur le fonctionnement du système scolaire était aussi dangereuse que de confier la sécurité d’une centrale nucléaire au premier passant venu. C’est une erreur.
On ne peut pas vouloir défendre une école publique, laïque et républicaine, financée par le citoyen-contribuable, et chercher à l’évincer, chaque fois qu’on peut, du débat sur les objectifs, le fonctionnement et les résultats du système scolaire.
Olivier Feller
Député radical
Article publié dans 24 heures du 30 septembre 2008