Le fédéralisme, la garantie de la propriété, la modération fiscale, la sécurité juridique, le sens de l’équilibre entre les régions… Ce sont quelques-uns des principes qui font la force et le succès de la Suisse. La révision de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT) acceptée par le Parlement le 15 juin 2012 bat en brèche tous ces principes. Le peuple aura heureusement l’occasion de refuser cette révision lors du scrutin du 3 mars prochain.
L’article 75 de la Constitution fédérale prévoit que les cantons sont responsables de l’aménagement du territoire, la Confédération devant se limiter à fixer les principes applicables. La révision de la LAT contrevient à cette disposition constitutionnelle, soumettant les cantons à une réglementation détaillée uniforme. Elle introduit une taxe sur la plus-value foncière, prélevée lors du classement d’un terrain en zone à bâtir ou en cas d’augmentation des droits à bâtir, alors qu’il existe déjà en Suisse un impôt sur les gains immobiliers. La révision va même jusqu’à fixer un taux minimal obligatoire de 20%. Cette nouvelle taxe aura pour principale conséquence d’augmenter le coût des terrains et des logements qui y seront construits. La révision de la LAT impose aussi le déclassement des terrains constructibles qui dépassent les besoins théoriques prévisibles des quinze prochaines années.
Une facture à milliards
Bien que l’interprétation de ses résultats soit controversée, une étude sur les réserves de zones à bâtir réalisée en 2008 par le bureau Fahrländer, sur mandat de l’Office fédéral du développement territorial, montre qu’il sera nécessaire de déclasser plusieurs milliers d’hectares de zones constructibles pour répondre aux exigences de la LAT révisée. Le déclassement d’un terrain constructible étant assimilable à une expropriation matérielle, les propriétaires lésés exigeront - à juste titre - d’être indemnisés, ce qui coûtera plusieurs milliards aux collectivités publiques. Pire, le processus de déclassement imposé par la révision de la LAT produira une raréfaction des terrains à bâtir. Il en résultera une hausse des prix qui se répercutera sur le coût de construction des logements. Combinée à l’introduction de la taxe sur la plus-value, l’obligation de déclasser poussera les loyers à la hausse.
Les atteintes à la garantie de la propriété ne s’arrêtent pas là. La révision de la LAT prévoit aussi l’obligation pour les propriétaires de terrains à bâtir non-construits de construire dans un délai donné.
Un tas de questions sans réponses
La révision de la LAT créera une importante insécurité juridique. Comment les besoins prévisibles des quinze prochaines années seront-ils définis ? Est-il vraiment réaliste, dans un contexte européen et mondial mouvant, de vouloir évaluer avec certitude les besoins de la population et de l’économie sur une période de quinze ans ? Selon quelles méthodes la localisation des terrains à déclasser sera-t-elle faite ? Le produit de la taxe sur la plus-value sera-t-il versé au canton dans lequel la taxe est payée ou alimentera-t-il un fond mis en place par la Confédération ? Etc. Cette révision est surtout faite de questions sans réponses.
Olivier Feller
Conseiller national
Article publié dans Tribune du 23 janvier 2013