L'astuce des partisans de la révision de la loi sur l'aménagement du territoire (LAT) est d'essayer de faire croire que seul un dernier canton d'irréductibles Helvètes, le Valais, tente de s'opposer à l'impérium fédéral. Et qu'à la rigueur quelques autres pourraient être concernés, mais seulement à la marge. C'est faux. Tous les cantons sont concernés. La révision introduit en effet un moratoire sur les zones à bâtir. En clair, les cantons auront l’interdiction d’augmenter leurs zones à bâtir pendant une période pouvant durer cinq ans.
Ce moratoire est organisé par les dispositions transitoires de la loi, qu'en général personne ne lit avant les votations… Et pourtant, ce moratoire va conduire les cantons dans le mur. Les projets de logements et d’infrastructures qui dépendent de la création de nouvelles zones à bâtir seront bloqués, notamment dans les régions qui en ont le plus besoin, comme à Genève.
La révision aura d'autres conséquences désastreuses. Elle provoquera une augmentation du prix des terrains et des logements. Pour deux raisons.
Première raison. La révision a pour objectif de réduire les zones à bâtir dans l'ensemble du pays et de les concentrer dans les régions urbaines. Les prix des terrains vont donc prendre l'ascenseur là où l'on pourra continuer de construire, à commencer par les régions où la demande est la plus forte et où les terrains sont déjà les plus chers. On en sait quelque chose sur l'arc lémanique. C'est la loi de l'offre et de la demande. On n'a jamais vu que la raréfaction d'un bien n'en augmente pas le prix.
Deuxième raison. La nouvelle LAT introduit sur l'ensemble du territoire une taxe d'au moins 20% sur la plus-value foncière. Cette taxe n'existe actuellement que dans quatre cantons, dont Neuchâtel et Genève en Suisse romande. Mais elle est de 15% seulement à Genève, où elle n'est d'ailleurs pas encore entrée en vigueur. Sans citer le moindre chiffre à l'appui de leurs dires, les partisans de la LAT prétendent que la taxe de 20% n'a pas fait augmenter les prix dans le canton de Neuchâtel. Il n'y a qu'un problème: on n'a jamais vu que l'introduction d'une nouvelle taxe n'augmente pas le prix de la chose taxée.
Les dégâts que provoquera cette nouvelle loi mettent en évidence le caractère bâclé de cette révision. Elle va instaurer un magnifique petchi institutionnel dans tout le pays. La conseillère fédérale Doris Leuthard explique d'ailleurs tranquillement que le processus déclenché par la loi pourrait prendre vingt ans. Vingt ans pour adapter les zones constructibles aux besoins de quinze ans! Autrement dit, les besoins auront complètement changé quand on arrivera au bout du processus. Tout ça pour ça. Et à quel coût!
Olivier Feller
Conseiller national PLR
Article publié dans la Tribune de Genève du 5 février 2013