Depuis des mois, le système fiscal suisse est exposé à un bombardement de critiques de la part d'autres Etats, en particulier de l'Union européenne. Il est accusé d'être trop attractif, aussi bien pour les personnes physiques au bénéfice de forfaits fiscaux que pour les entreprises étrangères auxquelles certains cantons, dont le canton de Vaud, accordent des statuts spéciaux. "Concurrence dommageable", crient nos voisins. Le premier problème, c'est que bien d'autres pays que la Suisse disposent, eux aussi, de régimes fiscaux apparemment aussi attractifs que le nôtre. On cite souvent le Luxembourg, le Royaume-Uni, la Belgique, l’Irlande, Singapour et certains Etats des Etats-Unis. Comme le résumait récemment un spécialiste du droit fiscal, Xavier Oberson, à la Télévision suisse romande: "C'est assez paradoxal de voir la Suisse se faire vraiment critiquer par l'Europe pour ses avantages fiscaux et de voir qu'elle est en fait imitée par beaucoup de ses voisins."
C'est pourquoi j'ai déposé une motion demandant au Conseil fédéral d’analyser les régimes fiscaux appliqués notamment dans ces pays et d'en comparer l’attractivité à celle de notre propre législation fiscale. Ces informations devront être publiées dans un document simple, didactique et accessible au grand public afin de pouvoir être diffusé à une large échelle. Cette motion a été acceptée par le Conseil national par 141 voix contre 47 et 3 abstentions le 19 juin dernier. Elle sera débattue au Conseil des Etats en décembre.
Mais il y a plus vicieux. Ce sont les armes cachées de la concurrence fiscale. En plus des régimes fiscaux spécifiques que certains Etats tiers - y compris au sein de l'Union européenne - accordent aux entreprises qui viennent s'installer sur leur territoire, de nombreux pays ont également recours à des aides d'Etat. On ne compte plus les primes à l'innovation tous azimuts, les primes à la casse pour l'industrie automobile, les aides directes aux chantiers navals, etc. Ces aides d'Etat faussent le principe de la concurrence invoqué pour critiquer le système fiscal suisse. Comment expliquer, sinon, que certaines entreprises établies chez nous, comme Yahoo, choisissent d’aller voir ailleurs? Ces déménagements, n’auraient-ils aucune autre raison que les rigueurs du climat helvétique?
C'est pourquoi j'ai également déposé, en septembre dernier, un postulat demandant au Conseil fédéral d’exposer la manière dont il fait valoir l’impact de ces aides d'Etat lors des négociations internationales (avec l’OCDE, le G20, l’Union européenne, etc.) et les résultats obtenus à ce jour. Cet état des lieux est d'autant plus nécessaire qu'un débat va s'ouvrir prochainement aux Chambres fédérales concernant la réforme de l'imposition des entreprises.
Olivier Feller
Conseiller national PLR Vaud
Article publié dans Tribune du 30 octobre 2013