La Suisse prépare aujourd'hui une nouvelle révision de la fiscalité des entreprises. Pourquoi? Pour répondre aux critiques européennes qui jugent notre système trop attractif pour certaines catégories d’entreprises en raison des régimes spéciaux cantonaux qui leur sont accordés.
Cette réforme n'est pas une mince affaire. Si elle aboutit, elle aura des conséquences importantes, avec une baisse programmée des recettes fiscales dans de nombreux cantons, dont le canton de Vaud, et un impact sur la péréquation financière intercantonale. Elle ne doit donc pas être entreprise dans la précipitation, en voulant tout régler en même temps. Comme le souligne chaque fois qu'il le peut le conseiller d'Etat Pascal Broulis, elle doit au contraire être menée pas à pas, dans la plus grande réflexion.
Une réforme réalisée dans l'affolement sous la pression de l'Union européenne est d'autant moins justifiée que les critiques qui nous sont adressées par nos chers voisins sont loin d'être toutes justifiées.
En premier lieu, de nombreux Etats de l'Union européenne pratiquent aujourd'hui une fiscalité aussi attractive, voire plus avantageuse, que la nôtre pour les entreprises étrangères. Un seul exemple, mais il y en a beaucoup d'autres. Le 21 mars prochain, l'un des géants du web, l'américain Yahoo!, va installer en Irlande tous ses services européens qui se trouvaient jusqu'ici établis en Suisse. En raison de l'ambiance printanière qui règne à Dublin? Ou pour des motifs d'optimisation fiscale? Pour tout vous dire, Dublin pratique un taux d'imposition sur les sociétés de 12.5%, l'un des plus bas d'Europe, et n'opère aucune retenue à la source sur les bénéfices qui quittent le pays.
Mais il y a mieux encore avec les aides d'Etat. De quoi s'agit-il? Ce sont les aides matérielles financières qui sont accordées par les collectivités publiques aux entreprises pour soutenir leurs activités. Ces aides peuvent prendre les formes les plus diverses, de la prime à l'innovation pour les secteurs de pointe aux primes à la casse pour l'industrie automobile, en passant par le crédit d'impôt ou l'aide directe sous forme d'enveloppe financière. Mais toutes ces interventions aboutissent dans les faits à fausser le principe de la concurrence invoqué pour critiquer les régimes fiscaux cantonaux appliqués par la Suisse à certaines entreprises.
Si vous êtes tenté de croire qu'il s'agit de "peanuts", détrompez-vous. Le 18 juin 2013, un rapport sur les aides aux entreprises installées en France a été remis, à sa demande, à Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Ce rapport met en évidence trois chiffres: 6’000 aides sont fournies aux entreprises par une administration comptant 15’000 fonctionnaires pour distribuer 110 milliards d’euros par an. Des bricoles, quoi!
Olivier Feller
Conseiller national PLR Vaud
Article publié dans Tribune du 19 février 2014