Les paysans suisses sont inquiets. Ils ont de quoi douter des intentions du Conseil fédéral à leur égard. Si le gouvernement souhaite rester crédible en matière de politique agricole, il ferait mieux de tenir les engagements pris. Ce n’est pas le chemin qu’il a choisi en préparant le budget 2015 de la Confédération. Son projet veut diminuer de 130 millions de francs l’enveloppe financière annuelle adoptée par le Parlement en mars 2013 dans le cadre de la Politique agricole 2014-2017. A moins de s’appeler François Hollande, on ne peut pas prévoir une enveloppe financière au printemps 2013 et la réduire brutalement en automne 2014. Rien, dans la situation de notre pays, ne justifie une telle volte-face.
J’ai donc déposé, avec d’autres, plusieurs amendements au sein de la sous-commission des finances chargée de l’Office fédéral de l’agriculture pour rétablir le budget agricole tel qu’il était prévu. Et je me battrai dans ce sens lors du débat budgétaire en plénum du Conseil national lors de la session de décembre prochain. Dans l’immédiat, la commission des finances du Conseil national a déjà proposé de réinjecter 110 millions de francs dans le budget agricole 2015.
Ne tuons pas notre agriculture à petit feu. Nous en avons besoin aujourd’hui. Nous pourrions en avoir besoin demain, autrement que nous le pensons dans un monde globalisé. Il n’est évidemment pas question de vouloir assurer l’autosuffisance alimentaire de la Suisse. Mais nous devons veiller à ne pas augmenter notre dépendance à l’égard des produits importés qui couvrent aujourd’hui entre 50 et 60% de nos besoins.
Cette année, la Suisse va devoir importer davantage de céréales qu’à l’ordinaire pour faire du pain. La faute aux conditions climatiques qui ont rendu 100'000 tonnes de céréales impropres à la panification. Mais les changements de climat en cours à travers la planète ne sont pas les seuls risques encourus. Les incertitudes politiques qui se manifestent, en Europe même, ne devraient pas nous inciter à un optimisme trop béat en matière de sécurité des échanges.
La sécurité alimentaire n’est d’ailleurs pas seulement une question d’approvisionnement. C’est aussi une question de qualité. Et les normes auxquelles les agriculteurs suisses doivent répondre sont beaucoup plus élevées qu’ailleurs, sans qu’il soit nécessaire de songer aux ragoutants scandales alimentaires qui secouent régulièrement la Chine.
De plus en plus de consommateurs suisses comprennent que le prix ne peut pas être le seul critère de leur choix. Qu’une agriculture de proximité respectueuse de l’environnement permet mieux que le meilleur contrôle international de garantir des produits qui méritent le nom d’aliments. Car c’est aussi à la population de savoir si elle préfère qu’on lui parle vérité, y compris des prix, ou qu’on lui raconte des salades.
Olivier Feller
Conseiller national PLR Vaud
Article publié le 27 novembre 2014 dans 24 heures