Le deuil de la prévoyance vieillesse 2020 ne peut pas se faire sans douleur ou émotion. La votation du 24 septembre dernier n'a pas seulement scellé l'échec d'un projet défendu par un conseiller fédéral qui n'hésitait pas à dire que le refus de son projet signifiait la fin de l'AVS. Le projet était également soutenu par la gauche, le centre, la grande majorité des médias, et même certains milieux de l'économie. Après cela, on ne peut pas débattre sereinement dans les semaines qui suivent. Il faut laisser aux uns et aux autres un temps de réflexion pour reprendre le dossier sur la base des réalités.
Deux éléments clés ressortent de la situation en ce qui concerne l'AVS. Premier élément : l'initiative AVSplus, qui voulait augmenter toutes les rentes de l'AVS de 10%, a été rejetée le 25 septembre 2016. Il y a quelques jours, c'est le projet d'augmenter de 70 francs toutes les rentes AVS des futurs retraités qui a lui aussi été refusé. Il faut donc admettre que le peuple ne veut pas d'une augmentation des dépenses d'une AVS en situation déficitaire depuis trois ans déjà. Deuxième élément : la population ne veut pas davantage d'une baisse des rentes. Et l'augmentation généralisée de l'âge de la retraite à 67 ans n'a aucune chance en votation populaire dans les circonstances présentes. Voilà les lignes rouges à ne pas franchir.
La première piste de solution passe donc par une augmentation raisonnable des recettes de l'AVS, au travers d'une hausse du taux de la TVA par exemple, pour remédier à la spirale des déficits. Ce premier volet du plan B serait complété par l'aménagement du passage à 65 ans de la retraite des femmes et la flexibilisation de l'âge de la retraite, qui n'est pas contestée.
L'autre enseignement à tirer du 24 septembre, c'est l'échec de « l'idée force » de Prévoyance vieillesse 2020, soit le mélange du premier et du deuxième pilier. Cela ne signifie pas qu'il faut renoncer à une vision d'ensemble. Mais on ne saurait compenser une diminution des rentes dans un des piliers par une augmentation des rentes dans l'autre. Il faut conserver l'équilibre actuel, où chacun des piliers joue un rôle nécessaire et complémentaire.
La diminution du taux de conversion applicable à la part obligatoire du deuxième pilier, qui faisait partie de Prévoyance vieillesse 2020, est probablement nécessaire à terme. Mais pour qu'une telle mesure soit susceptible de majorité populaire, il faut que les caisses de pension expliquent clairement la nécessité d'une telle mesure pour qu'on puisse en établir un échelonnement convaincant. Pour compenser les effets de la diminution de ce taux de conversion, il faudra, vraisemblablement, soumettre aux cotisations les salaires dès le premier franc, c'est-à-dire supprimer l'actuelle déduction de coordination.
La réforme des retraites pourra ainsi trouver un chemin entre la hache de l'urgence et l'aveuglement du laisser-aller.
Olivier Feller
Conseiller national PLR/VD
Article publié dans le Journal des arts et métiers du mois d'octobre 2017